L’albatros

Découvrez un nouveau poème de Nora Moubarak pour sa rubrique Lettres Levantines !

Enfin l’albatros – géant des airs – mit pied à terre. Ses occupants le quittèrent fiers, saluant une dernière fois le cèdre vert tatoué à ses flancs blancs. La valse prit pied au sein des artères du monde, rougeoyantes d’excitation. Les portes s’ouvrirent sur un monde nouveau, peuplé d’azur, de légendes et d’âmes légères dansant sur le roulement farouche des tamtams, sur la voix des oud qui s’enflamment. L’Orient flottait dans l’air, majestueux !

            « Ouvrez vos narines, fermez les yeux !

Vous êtes sur les terres vous ayant vu naître, vous êtes sur les terres des prophètes, vous êtes al-beit ! »

Les effluves épicées tournoyaient au-dessus des têtes, se jumelant à la chaleur suave. Les audacieux, aux corps sculptés par le travail de la mer, invoquèrent sur tous les toits, haut et fort, les cieux :

            « C’est ici-bas ! Là, une seule règle opère ; un juillet capricieux, août bénit des cieux. »

Leurs plaies, à peine cicatrisées, ne sauraient taire leur jeune liberté retrouvée, encore décadente et fuyante toute mesure de pieds.

Nora Moubarak

En exclusivité, un petit mot de notre autrice sur le genèse de ce poème :

“ C’est un poème qui date du lycée… je dois creuser ma mémoire ! L'albatros doit sans doute venir de notre cher Baudelaire, cette image des travailleurs de la mer vient d'un tableau que j'ai vu au Liban (au musée al-Nabu que j'adore à Batroun) qui m'avait aussi inspiré “ Le Soir teinte le Ciel “ (à lire ici 👈🏼).

Je revenais de mon plus long voyage au Liban où j'avais vu la différence de climat entre le mois de juillet et d'août. J'en étais très étonnée mais tout le monde rigolait de moi en me disant qu'en juillet il faisait toujours ce temps instable...

Petite j'ai très longtemps été séparée du Liban et je l'ai réellement vécue comme une amputation, un exil forcé alors que je suis née en France ! Cet été-là j'y suis resté plus d'un mois. C’était juste avant la crise… un vrai paradis avant le déluge de 2020. Le retour était très difficile avec de vrais flash black de Beyrouth et Batroun qui me revenaient sans cesse. Lorsque j'arrive au Liban, ce qui me fait réaliser que je suis bel et bien au pays c'est l'odeur des cèdres et de la mer en même temps ! Un vrai souvenir de petite fille que je répète à chaque fois, mes pattes continuent de pousser les valises mais ma tête s'imprègne le plus possible de cette odeur ! “

Et pour lire encore plus de textes de notre contributrice, rendez-vous juste ici 👇🏼

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